Traduit de l’anglais, paru dans le N-Y Times le 31 décembre 2018
Actuellement, les appareils auditifs et les services d’accompagnement ne sont généralement pas couverts par une assurance maladie. Cette couverture a été expressément exclue lorsque la loi sur l'assurance-maladie a été adoptée en 1965 « une époque où la déficience auditive n'était généralement pas reconnue comme un problème médical et où les appareils auditifs n'étaient pas très efficaces » a déclaré le Dr Frank R. Lin, qui dirige le Cochlear Center for Hearing.
Aujourd’hui, un nombre croissant de recherches aboutissent à la conclusion qu’une perte auditive non traitée équivaut à une maladie coûteuse. Il est temps de prendre au sérieux la protection et le traitement de la perte auditive.
Une mauvaise audition est non seulement gênante et invalidante pour des millions de personnes, en particulier les personnes âgées, mais représente, de surcroît, un risque indéniable pour la santé, menaçant l'esprit, la vie et les blessures corporelles. Dont le coût, pour le système de santé, s’avère à terme, beaucoup plus élevé que de rembourser des prothèses auditives.
Deux nouvelles études ont montré une corrélation nette entre une perte auditive non traitée et un risque accru de démence, de dépression, de chutes et même de maladies cardiovasculaires. Une perte auditive non corrigée semble bien être la cause de problèmes de santé associés.
Dans l'une des études portant sur 154 414 adultes âgés de 50 ans et plus ayant des réclamations d'assurance-maladie, des chercheurs de l’Université Johns Hopkins (Maryland, Etats-Unis) ont découvert qu'une perte auditive non traitée augmentait de 40% le risque de développer une démence et ou une dépression en seulement cinq ans, par rapport aux sondés sans perte auditive.
Suite à une analyse sur un grand échantillon, l’équipe de Nicholas Salvatore Reed (l’Université Johns Hopkins) a également établi un lien entre la perte d’ouïe non traitée et le nombre d’hospitalisations et de réadmissions plus longues aux services d’urgence.
En 10 ans, les pertes auditives non traitées représentaient 3,2% de tous les cas de démence, 3,57% des personnes gravement blessées lors d’une chute et 6,88% des personnes en cours de traitement pour dépression. Des pourcentages d’apparence minime, mais, qui, compte tenu de leur fréquence, touchent un très grand nombre de personnes, entraînant des coûts financiers personnels et sociétaux considérables.
Pour une personne âgée non traitée, l’augmentation des coûts de soins de santé a augmenté de 46% sur une période de 10 ans, par rapport aux coûts supportés par les personnes non-malentendantes.
L’un des auteurs, Jennifer A. Deal, épidémiologiste et gérontologue à la faculté de santé publique Johns Hopkins Bloomberg, a déclaré que «si la perte d’audition n’est pas très chère, son effet sur tout le reste est coûteux ».
Malheureusement, les gens ont tendance à attendre beaucoup trop longtemps pour tester et traiter leur audition. Or, plus ils attendent, plus il est difficile de traiter la perte auditive. Celle -ci, liée à l'âge survient très lentement, empêchant les personnes de savoir quand la prendre au sérieux. Il existe deux bons indices d’alerte : les réactions de membres de la famille ou de l’entourage pointant les répétions ou les mauvaises compréhensions de l’interlocuteur.
Cependant même lorsque les gens sont testés et dépensent énormément pour acheter des appareils auditifs, ceux-ci restent souvent dans un tiroir. Les gens se plaignant de la qualité sonore médiocre, trop statique ou gênante, et reprochant aux aides d’amplifier les sons, les rendant encore difficiles à entendre dans un environnement bruyant. Le Dr Lin a déclaré que toutes les aides ne sont pas identiques, et même des aides coûteuses et bien ajustées peuvent nécessiter de nombreux ajustements.
"Les attentes irréalistes sont une grande partie de ce problème", a déclaré le Dr Lin. « Ce n’est pas comme porter une paire de lunettes qui permet immédiatement de voir clairement », a-t-il déclaré. « La perte auditive n’est pas aussi facile à réparer que la vue. Le cerveau a besoin de temps - un bon mois ou deux - pour s’adapter aux appareils auditifs. Et plus tôt la perte d'audition est traitée, plus il est facile au cerveau de s'adapter. ”
Les nouvelles études donnent de nombreuses raisons de prendre au sérieux la perte auditive. Considérons, par exemple, le lien avec la démence. Les personnes malentendantes deviennent souvent isolées socialement et privées de stimuli or lorsque ceux-ci diminuent, le cerveau fonctionne moins. A contrario, il est également davantage sollicité lorsqu'il est contraint d'utiliser une trop grande partie de sa capacité au traitement du son. Malgré ce que qu’on peut penser, notre cerveau n'est pas conçu pour le multitâche.
"La perte auditive n'est pas un problème de volume", a déclaré le Dr Deal. « C’est un problème de qualité sonore. Certaines parties des mots disparaissent et la parole sonne comme un marmonnement. Un message déformé est envoyé au cerveau lui indiquant qu'il doit travailler plus fort pour décoder. "
De plus, lorsque l’information n’est pas entendue clairement, elle gêne la mémoire. « On se souvient plus facilement d'un bon signal auditif clair », a déclaré le Dr Deal. « La clé de la mémoire est de prêter attention. Le cerveau ne peut pas rester concentré sur les mots quand il travaille des heures supplémentaires pour décoder le signal. "
Le Dr Deal a déclaré que ses coauteurs et elle-même avaient été surpris de trouver un lien entre une déficience auditive et une maladie cardiovasculaire. « Il est possible que la maladie vasculaire soit commune aux deux », a-t-elle déclaré, mais a ajouté que l'isolement social et le stress résultant d'une perte auditive joueraient également un rôle.
L’original Rédigée par Jane E. Brody
Lien vers l’article : https://www.nytimes.com/2018/12/31/well/live/hearing-loss-threatens-mind-life-and-limb
Lien vers l'étude : https://jamanetwork.com/journals/jamaotolaryngology/article-abstract
Article sur le même sujet : https://www.1001audios.fr/actualites/deficit-auditif-et-dependance